Magies tibétaines à la Maison Alexandra David-Néel

Baptisée Samten Dzong, ou Résidence de la réflexion, par celle qui en fut la dernière occupante, la maison Alexandra David-Néel est aujourd’hui un musée consacré à l’existence de cette exploratrice hors du commun. Organisée en collaboration avec le Musée national des Arts Asiatiques – Guimet, l’exposition Entre mystiques et magiciens tibétains fait références à un livre publié par Alexandra David Néel en 1929 intitulé Mystiques et Magiciens du Tibet. Ce dernier s’appuie sur son expérience auprès des communautés religieuses du Tibet rencontrées pendant son voyage en 1911 et 1925 qui la mène jusqu’à Lhassa. Mélange de théorie et de pratique, elle y décrit les différents rituels du bouddhisme tibétain tels qu’elle a pu les observer, souvent différents de l’image qu’en ont alors les occidentaux.

Vue de l’exposition. Crédits : Ville de Digne-les-Bains

Une quête de spiritualité intérieure

Vue de l’exposition. Crédits : Ville de Digne-les-Bains

L’attrait d’Alexandra David-Néel pour les diverses spiritualités s’éveil alors qu’elle est encore une jeune femme. Au début du XXe siècle, l’Europe voit se développer de nombreux courants de pensée liés à l’ésotérisme comme l’Occultisme ou la Théosophie. Déjà, Alexandra David-Néel y porte un regard aussi curieux que critique, moquant la crédulité de ses adeptes. C’est cependant sa quête d’une expérience spirituelle authentique qui la pousse à partir au Tibet et ne la quitte pas pendant ses quatorze années de voyage. Au contact du Tibet, elle devient une fervente bouddhiste et adopte l’approche érémitique de sannyāsin ou renonçante. David-Néel était une adepte du Hinayana (bouddhisme du petit véhicule). Elle avait également une bonne connaissance des courants du Mahayana grâce à son séjour au sein du monastère de Kumbum lors duquel elle a traduit le Sutra de la Perfection de Sagesse. Elle a également reçu les enseignements secrets de l’école du Dzogchen, l’un des courants du bouddhisme tibétain.

Comprendre le bouddhisme tibétain

Vue de l’exposition. Crédits : Ville de Digne-les-Bains

Passionnée de spiritualité, Alexandra David-Néel eut un regard critique sur le bouddhisme tantrique qu’elle découvrait au Tibet. Fervente lectrice des stoïciens et des mystiques chrétiens, elle n’en gardait pas moins un esprit lucide et pragmatique, cherchant à comprendre la pensée profonde du bouddhisme tibétain. Comme elle le décrit, son champ d’étude se concentrait à distinguer la différence entre mystiques et magiciens :

« Philosophies, religions élevées ou puériles, audaces des magiciens, roueries des sorciers, extases des mystiques, tel était mon champ de recherches que je fouillais avec assiduité et patience, glanant, ça là, les faits que je collectionnais. »

Au tournant du XXe siècle, le bouddhisme tibétain était encore mal compris. Par son travail de terrain, Alexandra David-Néel a apporté une compréhension plus profonde du le bouddhisme tel que pratiqué au Tibet. Elle en déduit justement qu’il s’agit d’un mélange d’héritage du shivaïsme indien et de la religion Bön, religion locale présente avant l’introduction du bouddhisme au VIIe siècle.

Rites des mystiques tibétains

La pratique du bouddhisme tibétain repose sur des pratiques magico-religieuses. Selon David-Néel, ces rites sont indissociables des paysages himalayens arides et majestueux de haute montagne. Ils exerçaient sur elle leur intense pouvoir magnétique. Ils sont également à mettre en relation avec la croyance populaire locale que le Tibet est un pays peuplé de démons et de forces obscures redoutables. Au cours de ses recherches et au contact des adeptes du bouddhisme, David-Néel a distingué les magiciens qui utilisent des forces occultes à des fins bénéfiques ou maléfiques des mystiques qui aspirent à atteindre la « Connaissance transcendante » par leur pratique du bouddhisme.

Vue de l’exposition. Crédits : ville de Digne-les-Bains

David-Néel a observé et décrit de nombreuses pratiques d’entrainement psycho-physique permettant aux pratiquants de développer leur concentration et d’accéder à des états de conscience supérieurs. Elles incluent notamment la méditation sur le Livre des morts tibétain, la pratique du Toumo lors de laquelle le pratiquant médite à même la neige et le rituel du chod, signifiant « couper à travers », qui a pour but de couper les obstacles à l’élévation de l’âme. Tous ces rituels ont pour but d’aider l’adepte à se détacher de l’aspect matériel du corps.

En s’appuyant sur le travail réalisé par Alexandra David-Néel lors de son voyage au Tibet entre 1911 et 1925, cette exposition éclaire sur les pratiques magiques et secrètes des adeptes du bouddhisme au Tibet. Une belle occasion de (re)découvrir ce lieu unique empli de spiritualité !

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Plus d’informations sur l’exposition et sur la Maison Alexandra David-Néel.

Image de couverture : Vue de l’exposition. Crédits : Ville de Digne-les-Bains.

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