Les Kesas, des œuvres de tissu

Portés par les moines bouddhistes japonais, les kesas sont des manteaux découlant des vêtements des ascètes indiens constitués de lambeaux de tissu. Ils apparaissent sur l’archipel dès l’arrivée du bouddhisme au VIe siècle.

La « robe de rizière de bon augure »

Au Japon, le kesa comprend trois vêtements portés séparément. L’un, nommé anda-e, est utilisé pour dormir et travailler ; l’autre, l’uttarasô, est porté pour les tâches monastiques quotidiennes ; enfin le sôgyari, plus luxueux, est revêtu lors de cérémonies publiques et de visites à d’autres temples.

Kesa à sept bandes, soie, fin XIXe – début XXe (époque Meiji). Metropolitan Museum, New York City. (Public Domain)

Les kesas sont constitués de bandes de tissu verticales et horizontales cousues les unes aux autres. Un kesa peut en compter entre cinq et vingt-cinq bandes verticales, chacune étant délimitée d’une inter-bande. Le nombre dépend du rang hiérarchique du moine qui le porte. Les bandes de tissu sont de chanvre ou, le plus souvent, de soie. Luxueux et richement ouvragés, ils proviennent en général de dons de la population qui espère ainsi être comprise dans les prières des moines.

A ces bandes s’ajoutent des petits carrés disposés dans les angles de l’étoffe. Appelés shiten, ils symbolisent les points cardinaux. En effet, la forme et la conception même du kesa renferment des symboliques relatives aux conceptions bouddhistes. Il peut ainsi, pour certaines sectes, représenter un mandala.

Une histoire liée au développement du bouddhisme

L’apparition des kesas au Japon remonte à l’introduction du bouddhisme au cours du VIe siècle. Les plus anciens connus auraient ainsi appartenu à Shôtoku (574-622), régent de l’impératrice Suiko, ayant eu un rôle majeur dans la propagation de cette religion.

Au XIIe siècle, l’enseignement bouddhiste est marqué par un fort intérêt pour les doctrines chinoises. Le moine Dôgen (1200-1253), revenu d’un séjour dans l’Empire du Milieu, écrivit de nombreux textes sur le kesa et ses symboliques. Par ailleurs, des innovations textiles continentales permettant l’ajout de fils d’or et d’argent dans le tissage de la soie motivent l’achat de kesas chinois que l’on retrouve ainsi en grand nombre.

Lors de la fermeture du Japon à l’étranger (1650-1842), l’industrie textile japonaise prend un essor important, notamment dans le quartier de Nishijin, à Kyoto. Les kesas deviennent de plus en plus luxueux et les tisserands réalisent des prouesses techniques rarement égalées.

Subissant les répressions du pouvoir lors de la période Meiji (1868-1912), les temples bouddhistes vendent de nombreux kesas à des collectionneurs occidentaux, expliquant leur présence dans nos collections. La production de kesas luxueux destinés au clergé se perpétue au Japon aujourd’hui, appuyée par des artisans du textile ne cessant de perfectionner leur art.

Pour en savoir plus …

Linhartová, Věra et Alan Kennedy, Manteau de nuages. Kesa japonais, XVIIIe – XIXe siècles., Collections De L’Association Pour L’étude Et La Documentation Des Textiles D’Asie, Paris [exposition], Musée National Des Arts Asiatiques-Guimet, Paris, Automne 1992, Musée Des Tissus, Chambre De Commerce Et D’industrie De Lyon, Décembre 1991-mars 1992. Paris: Réunion Des Musées Nationaux, 1991.

Alan Kennedy, Costumes japonais, Paris : Adam Biro, 1990.

Bernard Faure, « Quand l’habit fait le moine: The Symbolism of the kāsāya in Sōtō zen », Cahiers d’Extrême-Asie, vol. 8 « Mémorial Anna Seidel. Religions traditionnelles d’Asie orientale. Tome I »,‎ 1995. (URL : https://www.persee.fr/doc/asie_0766-1177_1995_num_8_1_1101)

Image de couverture : Kesa à 7 bandes, soie, XIXe. Don de Miss Bella Mabury, Los Angeles County Museum of Art (LACMA). (Wikipedia Commons).

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