Vous êtes déjà sûrement passé devant le haut portail du 11 rue Berryer, vous demandant ce que ce superbe hôtel particulier renfermait. Tokonoma y est entré et vous livre les secrets de l’hôtel Salomon de Rothschild et plus précisément de son précieux cabinet de curiosités, aujourd’hui administré par la Fondation des Artistes !
Un hôtel à la mémoire de Salomon de Rothschild

Edifié entre 1873 et 1882, l’hôtel est une commande de la baronne Hannah Charlotte dite Adèle de Rothschild, jeune veuve de Salomon de Rothschild, à la mémoire de son défunt époux mais également à celle de Balzac. La dernière demeure de l’écrivain se situait en effet à cet emplacement et la baronne y fit construire une rotonde en souvenir. Réalisé par un architecte diocésain peu connu, Léon Ohnet, l’hôtel de style néo-classique est composé d’un bâtiment principal et d’une aile en retour. Adèle de Rothschild s’y retire, vivant pendant près d’un demi-siècle « comme un bouddha au fond de son temple » selon le mot d’Elisabeth de Gramont, duchesse de Clermont-Tonnerre.
Le cabinet de curiosités

Entouré d’un couloir l’isolant du reste de l’hôtel particulier, le cabinet de curiosités fait figure de sanctuaire, de saint des saints à la mémoire de Salomon de Rothschild, avant-dernier fils de James de Rothschild, fondateur de la branche française de la célèbre banque. Il a été pensé par la baronne pour présenter la collection de son époux, offrant de lui une image fantasmée, bien lointaine de la réalité de ses placements boursiers hasardeux qui ont contraint son père à l’envoyer aux Etats-Unis. Salomon de Rothschild avait en effet commencé une collection de livres rares dès 21 ans, qu’il a rapidement enrichie après son mariage.
Ce cabinet de curiosités est un témoignage de ce type de pièce en vogue au XIXe siècle et que l’on retrouvait dans la plupart des hôtels construits par la famille Rothschild. Il est un des derniers exemples de cabinet des demeures Rothschild conservé dans un état proche de celui d’origine grâce à la volonté d’Adèle de Rothschild. En effet, lorsqu’en 1908 la baronne décide de léguer l’hôtel et ses collections à l’Etat, elle précise que « L’État devra conserver dans son état actuel la salle des curiosités et son contenu situés sur le côté de la cour et ayant des vitraux anciens en couleurs… ».
Une collection exceptionnelle

Tendu de tissus rouge et recouvert de cuirs dorés des Flandres, percé de trois fenêtres à vitraux suisses, le cabinet de curiosités renferme trois cent objets d’exception, d’origines diverses, exposés dans une volonté de présenter la diversité du monde et ses richesses.
Magnifiquement mise en valeur dans une vitrine conçue par Adèle de Rothschild, la collection de jades d’époque Qing est tout à fait remarquable, et particulièrement le Bouddha de Médecine. Trônant au sommet de la vitrine, ce Bouddha d’époque Qianlong (1736-1795) a été sculpté dans un seul bloc de néphrite d’un vert très pâle particulièrement apprécié en Chine.
À nouveau accessible au public depuis 2017, ce cabinet de curiosités offre une immersion totale dans l’intimité de la baronne et donne un aperçu du goût des Rothschild, une formidable famille de mécènes.
À l’occasion du Printemps Asiatique à Paris, trois œuvres du cabinet de curiosités sont mises à l’honneur dans la Viewing Room accessible en ligne.
En savoir plus
Le cabinet de curiosités est accessible le samedi matin en visite guidée à 11h, inscription au préalable à l’adresse suivante : visite@fondationsdesartistes.fr
Plus d’informations sur l’Hôtel Salomon de Rothschild ici et sur le cabinet de curiosités juste là.
Explorez les collections léguées par la baronne au Musée des Arts Décoratifs !
Un autre témoignage du goût pour les arts asiatiques au XIXe siècle : notre article sur le musée d’Ennery.
Image de couverture : Salle de Curiosités de l’Hôtel Beaujon (Hôtel Salomon de Rothschild), A. Gary, 1878, photographie, Bibliothèque Historique de la Ville de Paris, en ligne. Crédit : Ville de Paris / BHVP