L’ambitieux Tang Taizong

Après la mythique dynastie Han initiée par Han Gaozu s’étend une grande période de chaos politique qui met à mal le schéma impérial. Néanmoins, la dynastie des Sui reprend les rênes et fournit à la glorieuse (pour continuer dans les adjectifs encenseurs) dynastie Tang un terreau favorable à la paix et au faste. Ce luxe, on le doit notamment à son fondateur et à celui qui lui succède…

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Yan Liben (attr.), Détail – Tang Taizong recevant l’ambassadeur du Tibet, copie Song (960-1279), encre et couleurs sur soie, Pékin, Musée du palais impérial. Crédits photographiques : domaine public

Ascension

Li Shimin (李世民) appartient à une famille de gouverneurs militaires d’origine turque, probablement affiliée à des tribus toutes proches. Son père gouverne la province du Shaanxi, aux marges ouest de l’empire des Sui 隋 (581-618). Ambitieux et avide de pouvoir, il enrôle son père dans une révolte, alimentée par les mauvaises relations entre l’empire et les tribus turques. Ces événements mènent à la destitution des Sui et à l’établissement de la grande dynastie Tang 唐 (618-907). Li Shimin, calculateur, décide dans un  premier temps d’installer son père sur le trône. Ainsi Li Yuan devient Tang Gaozu (唐高祖), le premier empereur des Tang, de 618 à 626.

Néanmoins c’est Li Shimin qui dirige, son père ne fait que suivre ses directives. Il a des plans très particuliers pour son empire. Pendant le règne de Gaozu, Li Shimin poursuit ses activités militaires et supprime les ennemis du nouvel empire. Puis il force son père à abdiquer en sa faveur. Li Shimin devient Tang Taizong 唐太宗, et règne de 626 à 649. Rien de plus facile, vous aussi vous pouvez fonder un empire ! Ainsi peut-on régulièrement lire dans la littérature qu’il est le véritable fondateur des Tang.

Politiques intérieure et extérieure

On attribue à son règne l’instauration durable de la paix civile et une solide réorganisation administrative du territoire. C’est aussi à son instigation qu’est créée une nouvelle version du code pénal. C’est le Code des Tang, un incroyable texte juridique qui resta en vigueur jusqu’à la fin de la période impériale, au XXe siècle. C’est qu’il devait bien fonctionner ! C’est en effet un texte d’une logique sans faille. Chaque délit ou crime s’inscrit dans une échelle de gravité selon les circonstances, avec sa peine bien définie. Exceptions et cas de figure particuliers y sont également traités. Il révise aussi le système agraire pour permettre à chaque famille paysanne d’avoir une superficie cultivable suffisante à sa subsistance et au paiement des impôts. Ce qui est quand même plus généreux, et plus logique. Cela assure la régularité des rentrées fiscales. Mais Tang Taizong est un militaire, et c’est ce qu’il fait le mieux. Durant son règne, l’empire s’étend sur les territoires de l’actuelle province du Gansu. D’une manière générale, l’époque des Tang est faite de grandes conquêtes militaires, vers l’ouest surtout, permettant à la Chine de nouer de solides relations commerciales avec l’Asie centrale à travers les fameuses « routes de la soie ». Ces triomphes militaires sont en partie dus à la grande garnison de chevaux, puisqu’au milieu du VIIe siècle l’empire dispose de 700 000 chevaux environ. Le cheval est d’une importance politique et culturelle immense sous les Tang.

Tang Taizong et les chevaux

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Saluzi, coursier favori de Taizong, mausolée Zhaoling (Shaanxi), pierre, 196 x 206 cm, Philadelphie, Univeristy of Pennsylvania Museum of Archaeology and Anthropology. Crédits photographiques : domaine public

Et à propos de chevaux, Tang Taizong semble avoir eu une relation privilégiée avec eux, et en particulier avec les chevaux qui lui offrirent la victoire lors des batailles qu’il mena entre 618 et 622. Yan Liben 閻立本 (600-673), grand artiste des Tang, conçut six chevaux qui furent sculptés en haut-relief à l’extérieur du mausolée de l’empereur. Ce tombeau se trouve sur le site de Jiuzong Shan, dans l’actuelle province du Shaanxi. Aujourd’hui quatre des six sculptures sont conservés à Xi’an, les deux autres aux Etats-Unis. Chaque cheval est représenté sur une pierre grise individuelle. Les noms des chevaux ainsi que des poèmes élogieux écrits par Taizong lui-même étaient inscrits sur ces reliefs. Disparues, ces inscriptions se retrouvent heureusement transcrites sur une stèle érigée en 1089. Celle-ci constitue avec les reliefs de véritables annales historiques puisque dates et contexte des batailles sont aussi indiqués. Ainsi, on apprend que Te Qin Biao avait une crinière blanche et blonde, et qu’il fut monté durant la bataille qui opposa Taizong à Song Jingang en 619. Il fut sellé et dut supporter son cavalier en armure trois jours durant. Le poème indique qu’il galopa au-devant du danger, renversant les ennemis, et sauva la situation. Un vrai héros !

Tang Taizong est l’un de ces grands empereurs de paix et de prospérité. Ceux qui ont combattu, qui ont construit et réformé, ceux que l’on retient dans les livres d’Histoire en somme. Il ouvre la porte à 130 ans de paix, avant que le général An Lushan, en 755, ne mette l’empire à feu et à sang. 

Pour aller plus loin :

  • GERNET, Jacques, Le Monde chinois, Paris : Pocket, 2006, coll. « Agora », Tome I, 381 p.
  • ELISSEEFF, Danielle, Art et archéologie : la Chine du Néolithique à la fin des Cinq Dynasties (960 de notre ère), Paris, Réunion des musées nationaux, 2008, coll. « Manuels de l’Ecole du Louvre », 381 p.

Photo de couverture : Yan Liben (attr.), Tang Taizong recevant l’ambassadeur du Tibet, copie Song (960-1279), rouleau horizontal, encre et couleurs sur soie, Pékin, Musée du palais impérial. Crédits photographiques : domaine public

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