Du 20 octobre 2017 au 5 mars 2018 s’est tenue l’exposition Japanorama au Centre Pompidou de Metz, proposant un « nouveau regard sur la création contemporaine ». Nous allons voir ceci de plus près dans l’article qui suit !
Il est vrai que nous avons pour habitude de vous faire voyager dans le passé, mais aujourd’hui, nous vous proposons de plutôt retourner dans le présent ! Cet hiver, nous nous sommes donc rendus dans l’Est de la France, à Metz, pour vous emmener à la rencontre de l’art contemporain japonais. Cette exposition a été réalisée par Yuko Hasegawa, directrice du musée d’art contemporain de Tokyo, en partenariat avec le Centre Pompidou de Metz.
Ouvrons donc nos chakras et laissons nous séduire par les artistes du pays du Soleil Levant. Suivez le guide !
Quand le Grand Est rencontre le Petit Est (de la France)
L’exposition est répartie sur deux étages. Elle se découpe en différents « îlots », comparables aux îles qui composent l’archipel nippon. Ils font dialoguer entre eux différents médias artistiques : musique, vidéo, photo, sculpture, installations et peinture. Le parcours que nous suivons est chrono-thématique, nous faisant emprunter un chemin aux paysages variés mais à la structure limpide.
L’exposition interroge les problématiques chères à la société japonaise. Comment survivre face aux éléments de la nature ? Comment conserver la tradition dans un monde globalisé ? Que signifie être japonais au XXIème siècle ?
Mais avant d’aller plus loin, un petit avertissement : certaines œuvres peuvent heurter la sensibilité des non-initiés à l’esprit décalé japonais. Âmes sensibles s’abstenir !
Objet étrange : corps post-humain
Afin d’ouvrir le bal en douceur, voici les planches originales du manga Akira pour illustrer cette section de l’exposition. Elle se concentre sur l’appropriation du corps et de la technologie par l’art entre 1970 à nos jours.

Ce manga en particulier résume assez bien les problématiques de l’envahissement progressif de la technologie au quotidien. Il pose une réflexion sur l’avenir du transhumanisme. Akira est une vision apocalyptique de notre époque. Même si l’œuvre date des années 1980, elle n’a jamais tant fait écho aux problématiques contemporaines. A ajouter à votre liste de lecture en somme !
Vous avez dit kawaii ?
Cette nouvelle section de l’exposition sur la culture pop et néo-pop interroge l’interaction entre l’art et la culture de masse au travers d’artistes comme Murakami. Il pourrait constituer la version japonaise d’un Warhol occidental, avec une approche pop d’un art qui en dit plus qu’il n’y paraît. Ici, Murakami choisit de revisiter un classique de la tradition japonaise : le paravent, déjà présent dans les palais de seigneurs féodaux (Nobunaga) et impériaux, et encore aujourd’hui l’un des symboles par excellence du Japon classique. Il conserve ce support traditionnel mais lui appose une couverture pop, contemporaine, prenant le contrepied du fond d’or avec un fond argenté mais respectant finalement les codes traditionnels : un fond neutre habité d’un décor végétal équilibré, d’un naturel tout étudié.

Pour le plaisir des yeux, voici une photo de l’installation de la très populaire Yayoi Kusama, nous plongeant de force la tête dans les étoiles.

Collaboration / Participation / Partage
Abordons un nouvel îlot. Celui-ci se concentre sur la participation du public, la collaboration entre les artistes et le partage des idées entre ces deux acteurs. Un art plus interactif et participatif, tout à fait cohérent avec les enjeux muséaux d’aujourd’hui. Face aux catastrophes naturelles que furent les séismes de 1995 et de 2011, accompagné de leurs problèmes nucléaires, la communauté et sa survie deviennent primordiales. Les œuvres de cette partie questionnent et mettent en image cette idée de vivre ensemble dans un monde trop souvent instable.
Politique et poétique de la résistance
Qui a dit que les Pokémon ne pouvaient pas constituer une critique de la société ? Ici, le collectif Chim Pom parodie notre ami Pikachu sous la forme d’un rat empaillé tandis qu’un Godzilla des bacs à sable sème la pagaille dans le quartier de Shibuya. Ce qui est exprimé ici est un désir de critiquer avec humour l’incapacité des dirigeants à gérer les moments de crise. Ces rats géants n’ont quoi qu’il en soit pas l’air de déranger les passants, qui semblent s’en être accommodés.

Subjectivité
Le sujet ? Au Japon, on pense d’abord à la collectivité avant l’individu. Ici, l’ensemble des séries de photos exposées contredisent ce fait. Dans les années 1960, en photographie, apparaît le mouvement « subjectiviste ». Takashi Homma fige des images des quartiers de la banlieue tokyoïte, lieu de son enfance. Il s’intéresse aux contrastes entre la capitale surdéveloppée et sa périphérie marginalisée, souvent ignorée des touristes. Il prend des photos de ces habitants, plus authentiques que ceux résidant au cœur de la métropole.

Matérialité et minimalisme
C’est cette dernière section qui clôt notre voyage. Elle met l’accent sur l’art conceptuel et minimal de ces dernières années. La plupart de ces groupes, comme celui de Ma, se réclame d’une mouvance zen, ou Mono-ha (« école des choses »). Ces courants esthétiques irriguent l’art contemporain du XXIème siècle. Le parcours de l’exposition se finit avec cet écran organique, nommé Force , créé par Kohei Nawa, et c’est le rideau qui tombe sur notre voyage au pays du Soleil levant.

Nous espérons que vous avez apprécié cette brève visite virtuelle ! Cette exposition a ouvert une vitrine de la modernité de la culture japonaise dans l’Est français. Elle est le constat de cet art aujourd’hui. Souvent incompris du regard occidental, l’art contemporain japonais est marqué par sa culture propre, en plus de s’inscrire dans la mondialisation artistique de ce XXIème siècle.
Pour aller plus loin :
N’hésitez pas à consulter le dossier de presse de l’exposition Japanorama.
Photos : Pauline Redon