Dans l’intimité du peintre dandy Foujita

Si je vous évoque le nom de Léonard Tsuguharu Foujita, plus connu sous le nom de Foujita, cela ne vous dit peut-être pas grand chose. Aujourd’hui quelque peu délaissé dans la mémoire collective, ce peintre d’origine japonaise a pourtant été pendant près de vingt ans la coqueluche de l’avant-garde artistique dans le Paris des années folles. Tokonoma vous emmène aujourd’hui à la découverte de son oeuvre sensible et terriblement moderne, actuellement présentée au musée Maillol dans le cadre de l’exposition « Foujita, peindre dans les années folles ».

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Autoportrait dans l’atelier, 1923, Aquarelle, crayon et encre sur soie, The Lewis Collection

L’exposition se concentre sur la période de création de l’artiste alors qu’il côtoie le cercle des artistes étrangers du quartier de Montparnasse, de 1913 à 1931. Dès son arrivée à Paris, le Japonais devient vite une personnalité importante au sein de la jeunesse artistique des années folles. On le retrouve à faire la fête à La Rotonde ou au Dôme, entouré de ses amis Modigliani, Zadkine ou Soutine. A 27 ans, Foujita le dandy se sait beau garçon. Il séduit par son charme et son style si particulier caractérisé par son inimitable frange, sa fine moustache et ses boucles d’oreilles. Il joue avec son image en se mettant en scène dans des photographies aux multiples accessoires. L’autoportrait est également un thème récurrent chez l’artiste, qui se dépeint tantôt avec son chat adoré Mi-Ke, tantôt tel un lettré dans son cabinet. Il a d’ailleurs pour habitude d’offrir ses autoportraits à ses amis à la place des fleurs en leur disant : « Garde ma tête, au moins elle ne fane pas ! »

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Autoportrait au chat, 1928, huile et gouache sur toile, Centre Pompidou

Cette période de vie dans la fête perpétuelle parisienne est cruciale dans le travail de Foujita. Comme il le rappelle, en venant dans la capitale française, il rêve d’être « le premier peintre de Paris ». En effet, lors de son apprentissage aux Beaux-Arts de Tokyo, Foujita est mis au contact des principes de la peinture occidentale, pour laquelle il se passionne rapidement, et notamment pour l’œuvre de Claude Monet. Une fois à Paris, certainement galvanisé par les artistes qu’il côtoie, dont certains sont de véritables prodiges de leur temps, Foujita met au point sa technique, fait mûrir son style. Il réussit une synthèse sensible entre son apprentissage aux Beaux-Arts de Tokyo et la peinture occidentale qu’il découvre en copiant les œuvres du musée du Louvre. De la tradition picturale japonaise, il garde le goût pour la ligne et les lavis d’encre qui modèlent parfaitement les corps ainsi que le jeu avec le fond blanc du papier, considéré comme plein.

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Foujita dans son atelier peignant sa compagne Youki

Les femmes jouent un rôle important dans son oeuvre et plus particulièrement les portraits de nus, genre qu’il emprunte à l’occident car absent de la tradition japonaise. Avec la représentation des chats, à fortiori de son chat Mi-ke — « trois poils » en japonais , les portraits de ses compagnes rythment autant sa vie que son œuvre. C’est d’abord Fernande Barrey, peintre et modèle, qu’il rencontre en 1917 et qui est sa première muse.  Puis vient Lucie Badaud, qu’il surnomme Youki — « neige » en japonais — en raison de la blancheur de sa peau, et avec qui il vit une romance passionnelle jusqu’en 1931 avant de rencontrer Madeleine Lequeux.

En 1931, la fête est finie et il quitte brutalement Paris avec la jeune Madeleine. Il ne revient à Paris qu’en 1936 avec sa dernière épouse Kimiyo Horiuchi et repart pendant la guerre de 1940 à 1950. À son retour, il amorce alors une nouvelle période dans son travail, marquée par sa conversion au catholicisme. C’est à cette période qu’il adopte le prénom de Léonard.

L’exposition du musée Maillol nous transporte au cœur de l’avant-garde artistique des années folles à travers les yeux d’un peintre japonais passionné par la France. Elle réussit le tour de force de réunir un corpus conséquent d’œuvres de Foujita, dont la majeure partie est conservée en collection privée.

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Pour en savoir plus :

  • L’exposition « Foujita, peindre dans les années folles » se tient au Musée Maillol  du 7 mars au 15 juillet 2018
  • Si vous êtes curieux sur la dernière partie de la vie de l’artiste, sa dernière demeure en région parisienne se visite et c’est gratuit !

 

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