Cette fois, entrons pour de bon dans un musée pour un focus sur une beauté emblématique du département Chine du Musée national des arts asiatiques – Guimet : la dame au chignon.
Notre dame a vu le jour sous le règne de la dynastie Tang (618-907), plus précisément entre les VIIIe et IXe siècles. Elle est en terre cuite peinte, mesure 47 cm de haut et porte le numéro d’inventaire MA 6106.

Cette petite statue féminine porte une longue jupe bleu sombre fleurie, attachée très haut sous la poitrine, avec des manches rouges très longues. Ses chaussures à bout retroussé, dont les fouilles de Turfan, dans la province du Xinjiang, laissent penser qu’elles sont en soie, dépassent de sa jupe. Son visage replet et maquillé, aux traits fins, lui donne une mine enfantine. Elle est bien-sûr très connue pour sa coiffure, un chignon à double coque lui donnant un air de Mickey Mouse !
La technique de fabrication est simple, c’est celle d’un moule bivalve, donc un moule en deux parties, lui aussi en terre cuite. Chaque valve reprend une moitié de la forme voulue, donnant une fois assemblée et après cuisson notre statuette.

Cela étant dit, cette dame est une digne représentante d’une tradition funéraire remontant à l’Antiquité : les mingqi, littéralement « objet brillant », « ustensile lumineux » ou « objet du monde souterrain » selon les transcriptions. Ces mingqi apparaissent pour la première fois dans les tombes de la période Han (206 av. J.-C. – 220 ap. J.-C.). Ils jouent le rôle de substituts funéraires et peuvent selon les époques prendre la forme d’architectures miniatures, de femmes, d’hommes, de danseurs, de musiciens… Certains sont à cheval, d’autres armés, ou encore en train d’effectuer des activités agricoles. Parfois ce sont des chimères, des caravaniers, des animaux… Et nous avons donc aussi des dames de la cour ! N’oublions pas les tout aussi célèbres joueuses de polo.
Tout comme la chaussure en soie aristocratique, le modèle de la « beauté » s’exporte loin dans l’empire, et même au-delà ! En témoigne la joueuse de go peinte sur un rouleau provenant du cimetière d’Astana (province du Xinjiang) : joufflue, maquillée elle aussi avec ce fard rosé recouvrant la totalité de ses joues. Petite anecdote : on appelle souvent ces statuettes féminines aux joues replètes des Yuemian, ou « Visage-lune ». On comprend pourquoi…

Aux époques Sui (581-618) et Tang, ces beautés se font bien plus courantes parmi les mingqi. Elles sont le reflet d’une culture de la richesse et de l’ostentation, une culture de cour caractéristique d’une époque faste et raffinée, s’affichant aussi bien parmi les mingqi que sur les murs peints des tombes. On ne sait d’où provient exactement cette statuette, mais sans doute ornait-elle la tombe d’un courtisan ou bien d’un riche marchand… En tout cas d’un défunt bien accompagné !
Où la voir :
Musée national des arts asiatiques – Guimet, 6 place d’Iéna, 75016 Paris (1er étage – Chine classique)
Où voir d’autres mingqi :
- Musée Cernuschi, 7 avenue Vélasquez, 75008 Paris
- Musée Georges-Labit, 17 rue du Japon, 31400 Toulouse
Photo de couverture : Mingqi la dame au chignon © MNAAG, Paris, Dist. RMN-Grand Palais / Roger Asselberghs
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